lundi 22 août 2011

Coke en stock

Depuis un an que je suis dialysé, les séjours chez mes parents sont rares, et plutôt courts, l'espace d'un week-end, pas plus. En fait, je n'ai pas encore fait les démarches pour me rapprocher du centre de dialyse dans leur ville, du coup je ne reste pas plus de 3 jours...

N'y voyez pas un prétexte pour rester le moins possible, j'adore mes parents, là n'est pas le problème. Il s'agit juste d'enquiquiner une fois de plus la secrétaire médicale pour qu'elle faxe le dossier dans ce centre, alors que je lui ai déjà demandé pour deux autres centres en France, car j'ai la bougeotte (déplacements, vacances...) et j'ai un peu l'impression d'abuser de son temps...

Le WE dernier, en partance pour ma "cambrousse" natale, je plie mes bagages un peu trop vite et j'oublie ma schnouffe...

Poudre de perlimpimpin essentielle, ma coke n'est pas aussi stimulante ou planante que vous l'imaginez, au contraire, c'est toujours en me pinçant le nez que je l'absorbe diluée dans un verre d'eau. Le Kayexalate me permet de me débarrasser de l'excès de potassium... L'excès de potassium est dangereux : il provoque des crampes et à terme, même, des arrêts cardiaques. Ce serait ballot, hein ? Il empêche aussi d'uriner et donc de perdre les liquides consommés. Pour limiter la prise de poids entre deux séances, schnouffe obligatoire donc !

Les malades des reins ont souvent la joie d'absorber cette saloperie - désolé, il n'y a pas d'autre mot - à petite dose ou à pleines cuillères. La poudre très volatile ne doit surtout pas être inhalée, il s'agit de microbilles de polystyrène (une résine échangeuse d'ions) qui ont la propriété, à leur passage dans l'intestin, de libérer du sodium et de fixer à sa place du potassium. Oui, moi monsieur, le polystyrène, je le mange !

Chacun fait c'qui lui plait plait plait pour essayer de passer le goût et la texture rugueuse de ce plâtre couleur sable une fois humidifié. Avec du sirop, dans des yaourts, en se pinçant le nez... La seule contrindication étant de le consommer avec des jus de fruits ou du chocolat puisque tout ceci est plein de potassium ! C'est tellement bon à boire qu'il est précisé que le mélange peut-être administré en lavement ! Au choix, d'un côté ou de l'autre, mais vous le prendrez, votre médicament !

A mon guide « Goût et Mi-eau » pharmaceutique, le kayexalate, il a une sacré mauvaise note, et pourtant j'en ai bouffé des saloperies médicamenteuses dans ma vie ! D'ailleurs si des labos pharmaceutiques veulent un goûteur et des conseils, qu'ils n'hésitent pas à me consulter, je ne prends pas très cher de l'heure...

Le week-end dernier donc, j'oublie le kayexalate dans mon paquetage... Acte manqué ? Freud, soooooors de ce corps !

Heureusement, j'ai mes ordonnances avec moi.

Malheureusement la pharmacie de garde a cédé son dernier pot la veille : pas de coke en stock.

My mother fait 50 bornes pour trouver la pharmacie de garde suivante (telle est la vie en province...)

Dans cette petite ville, le pharmacien du dimanche ne voit pas passer souvent des ordonnance comme les miennes. A chaque nouvelle officine, c'est la même rangaine mais je dois dire que je ne suis pas peu fier de faire mon petit effet à chaque fois : « Oui le trou de la sécu, c'est ma faute, c'est ma très grande faute... fouettez-moi et qu'on en parle plus !».

Une feuille A4 recto-verso de médocs écrit en Arial 9, alors la question est inévitable : « Excusez-moi mais est-ce que je peux vous demander... » et là les formules divergent (et c'est beaucoup) selon le tact de chacun : … ce que vous avez ? ...votre pathologie ? … pourquoi vous prenez tout ça ? Etc.

Parfois, on tombe sur un pharmacien super perspicace ou très au courant qui fait directement le lien... « Muco ? Greffé ? ». Bingo... mais pas que !

Le pot de Kayexalate est sur le comptoir, le pharmacien prend la carte vitale.

- Vous ne faites pas payer un supplément le dimanche ?

- Pas pour les gens qui sont vraiment malades...

J'ai trouvé la démarche élégante, d'autant qu'un de ses collègues parisiens ne s'était pas privé de surtaxer, un WE où j'étais tombé en panne d'un autre truc...

Je repars avec ma schnouffe sous le bras, en me demandant comment font les gens qui n'ont pas une bagnole pour faire les 50km qui les séparent de la première pharmacie en cas d'urgence...

« Beurk, mais qu'est-ce que c'est dégueulasse ! »

Oui je sais, comme méthode Coué, on a trouvé mieux, mais ça vient du coeur !

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