mercredi 11 juillet 2018

Psy sexies(t) : tap tap tap, comment vous sentez-vous ?

Ce matin, je me remets le nez dans les liens et j'exhume une adresse qui commence par Blogger... et ... mais c'est un de mes blogs ! J'ai rapidement eu envie d'écrire un nouvel article...

D'une part, parce que ce sont mes articles et que, quand même, c'est pas de la merde (un peu d'autosatisfaction ne fait de mal à personne... et comme en plus, je vois bien que vous me lisez, mais qu'aucun ne se risque à commenter, autant m'envoyer des fleurs moi-même)

Et d'autre part, parce qu'après avoir bu 3 cafés, être allé 5 fois dans le réfrigérateur pour voir s'il n'y avait rien de neuf depuis 10 minutes, avoir nettoyé le clavier de mon ordi, avoir tenté de recoller la tringle à rideaux et d'autres choses aussi fondamentales quand une masse de travail vous attend, il fallait bien que je trouve un nouveau sujet de procrastination.

Du coup, je me remets à lire et je me rends compte que je vous avais lâchement largués en pleine saga de ce qui se tramait dans mon cerveau, avec des personnages de -chiatres, de -chologues et de -chothérapeutes aussi hauts en couleurs que l'académie Marvel réunie (mais avec beaucoup moins de pouvoirs pour certains).

Rappelez-vous :
Article 1 : Psy-cause toujours !
Article 2 : Psy bis...
Article 3 : vous y êtes...

J'en étais arrivé à... la femme. Psy Sexies. Et même sexiest diraient certains anglais amis de moi. C'est vrai qu'elle est jeune et jolie, sympa, rigolote. Niveau état d'esprit, on est loin de Lucienne Clothilde Madeleine des débuts.

PREVIOUSLY dans ma life chez les pros du cerveau :

Au cours de ma prise en charge au Grand Hopital Enigmatique Parisien (GHEP), Lili-les-bon-tuyaux me dit en juin : "Devoir de rentrée, listez l'ensemble des événements traumatiques de votre vie". La bonne blague ! C'est pas les vacances qu'il me faut, c'est une année entière !

Bon, heureusement, en vrai, je n'ai pas tant que ça d'événements importants que j'ai mal digérés. Mais au niveau mémoire et souvenir, je défaille grave. Il est super compliqué d'avoir accès à des souvenirs tout court, j'ai l'impression que j'ai fait des reformatage du disque dur au fur et à mesure. Il me reste de vagues réminiscences, des impressions à l'exception de quelques moments plus douloureux.

Cette obsession de l'exactitude est inutile (et accessoirement agace la psy, qui a bien raison, d'ailleurs car moi-même j'ai déjà du mal à me supporter parfois !) d'une part parce que personne n'a de souvenir qui soient "exact", c'est le vieux problème de "La carte et le territoire", et que d'autre part, on en n'a pas besoin car on travaille sur mon ressenti qui m'est propre et la façon dont tout ceci a mijoté dans ma tête depuis.

A partir de cette liste, Lisa utilise une technique proche de l'EMDR. Je ne vais pas décrire l'histoire et la technique, vous trouverez tout ça ici, en gros...

Il s'agit d'activer alternativement les hémisphères du cerveau pour simuler le même processus qui se déroule durant le sommeil, lorsque les souvenirs sont "digérés" par notre cerveau. On a alors plus facilement conscience des événements traumatiques passés, il est alors possible de les revisiter.

Concrètement, l'activation commence en tapotant alternativement sur les genoux gauche et droit.

Alors bon, après les préliminaires de discussions durant des séances, on s'est attaqué au gros morceau en parlant à mon mini-moi, enfin, mon "moi enfant".

Rire. Lol. Mdr. PTDR ! Regards désolés en mode "non mais attends chérie, tu crois sincèrement que c'est ce qui va me sauver ?"

— On va essayer, vous voulez bien ?
— Bah...
— Super !

Il y a quelque chose d'énervant chez les gens enthousiastes, c'est leur côté persuasif.

— Alors, concrètement, on va passer en mode hypnose, je vais tapoter alternativement sur vos genoux, vous me racontez votre souvenir traumatique tel que vous l'avez vécu enfant. Ensuite, je vais vous demander de vous localiser dans votre souvenir en tant qu'adulte et de parler à votre "vous enfant" pour le réconforter et lui dire ce qu'il aurait dû écouter à ce moment là. Et puis, si vous le permettez, ensuite je vais me localiser dans votre souvenir, et je vais parler à votre "vous enfant" pour le réconforter.

Rire. Lol. Mdr. PTDR ! Regards désolés en mode "non mais attends chérie, tu crois sincèrement que c'est ce qui va me sauver ?"

— Super, on y va !

Je la déteste.

Alors je raconte ce que j'ai livré ici. Tout pareil, jusqu'à la couleur du carrelage de la salle d'examens, car dans le cas de souvenirs traumatiques, tout est gravé avec précision dans votre tête (et c'est justement ça le problème !). Tout pareil qu'aux autres, je re-re-re-re-re-re-raconte.

Mais tap-tap-tap sur mes genoux.

Et puis, il faut bien que j'y retourne en tant qu'adulte, dans ce couloir. Retrouver le gamin sanglotant sur son brancard seul, puis entouré d'un papa qui fulmine de rage contre le médecin qui le prend de haut tout en marchant sur des oeufs parce qu'il a une blouse blanche (tâchée de mes vomissures)...

Tap-tap-tap sur mes genoux.

Impossible de parler à mon moi enfant, c'est ridicule cette situation. Et puis, bon, quoi dire ? "Désolé mon petit chéri, c'est la vie" ? On dit quoi, déjà, à un enfant ? Comment on lui parle ? Sur quel ton ? Avec quels mots ? Moi qui n'aime pas les mômes, qui suis toujours aussi gauche avec eux, si peu intéressé à ce qu'ils vivent, éprouvent, disent, sont, deviendront... qu'est-ce que je peux me dire à mon moi-même de 14 ans ? J'aurais aimé entendre quoi ? Aucune empathie.

Résultat peu probant. Lili se localise dans mon souvenir et réconforte l'enfant, comme la gentille maman qu'elle deviendra quand son ventre s'arrondira plus tard. Attentive, attentionnée, empathique, avec des mots simples et justes dont je suis incapable encore aujourd'hui (même si je m'améliore un peu). Je n'ai aucun souvenir de ce qu'elle a dit, mais j'en ai retenu la teneur et j'en ai encore la gorge serrée en écrivant ces lignes.

Retour au bureau du service de psy dans ce GHEP (Grand Hôpital Énigmatique Parisien).

Je suis bizarre. Ça va, j'ai l'impression que rien n'a changé et en même temps, il est en train de se passer quelque chose en moi. Fin de la séance, j'ai le téléphone de Lili si jamais je ne me sens pas bien ou si vraiment ça vrille en décompensation. Ça me paraît surréaliste.

Cinq minutes plus tard, je suis assis dans le grand hall en bas, entre un monsieur qui s'accroche à sa sonde urétrale pour tenir le coup (ne pas tirer trop fort) et une groupe de carabins qui boivent leur café qui a le goût du contenu de la poche à pipi du monsieur.

Et je suis Stone (que j'ai toujours préférés aux Beatles). Aussi camé que Jagger, aussi bourré que Richards sans avoir rien avalé ou fumé. Je suis là, entre Black and Blue, Blue and Lonesome, Emotionnal Rescue. Elle m'avait bien dit, Lili, de ne pas prévoir de rendez-vous à suivre et de rentrer chez moi. Je ne suis bon qu'à me lever et rentrer Where the Boys Go. Je me demande un peu ce qui m'arrive car jamais je n'ai connu cet état, une ataraxie qui n'en est pas tout à fait une...

Le soir, impossible d'accéder à ce foutu souvenir. Mon cerveau refuse. Catégoriquement. Impossible de me revoir la salle d'examen, le carrelage, ce que j'y ai vécu. Et c'est pas faute d'essayer. Et je suis bien obligé de constater que le coup du mini-moi et du tap-tap-tap sur mes genoux....
— Putain ! Ça marche ! (et là je l'imagine :)
— Super !

Il y a quelque chose d'énervant chez les gens biens, c'est leur modestie.

La séance d'après, elle est heureuse que ça ait marché. Point.

En attendant, je suis scotché. La technique stupide marche : pourquoi est-ce que aucun des autres psys n'avait cet arsenal à sa disposition dans sa boîte à outils de -chologue - chiatre ou de -chothérapeute ? Ça m'aurait fait gagner du temps ! Et le cerveau, c'est vraiment Terra Incognita. On le soigne avec des riens. A condition d'avoir les bons professionnels pour ça. Je regarde toutes les techniques alternatives avec une autre attention...

Le suivi avec Lili s'est espacé un peu, on avait réglé un gros dossier. Les techniques de méditation produisaient un peu leur effet et j'avais entre temps dépassé la période qui m'avait amené à consulter puisque j'avais été greffé et que les ennuis étaient provisoirement — derrière moi (une façon comme une autre de dire qu'ils me suivent comme une ombre tout au long de ma vie).

Et puis surtout, l'administration complètement cinoque et cynique de l'APHP et du GHEP s'est évertuée apparemment à fomenter de sales coups contre les intervenants extérieurs, ceux qui daignent venir pour la gloire la curiosité d'esprit et gagner en un mois ce qu'ils gagneraient en un jour en cabinet. Suppressions sauvages de postes, diminution des amplitudes horaires, suppression des jours de congés sans prévenir personne, surtout les intéressés...

On aurait peut-être du conseiller à l'administration de faire soigner par un bon psy : Lili.